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Ecole de
Beauvallon
Fondée en 1929 à Dieulefit (Drôme) par :
- Marguerite Soubeyran (29 avril 1894 - 14
novembre1980) fondatrice
- Catherine Krafft (10 août 1899 - 26 juin
1982) fondatrice
- Simone Monnier (19 août 1913 - vivant
actuellement à Paris), co-directrice, arrivée en 1936.
A elles trois , elles ont adopté cinq
enfants.
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Beauvallon et la Nouvelle
Education
Marguerite Soubeyran part approfondir
ses connaissances à Genève (1927) après ses études d'infirmière et l'ouverture
de sa pension de famille à Dieulefit. Son but est la création d'une maison
d'enfants qui aiderait à développer ceux qui sont en difficulté selon des
méthodes nouvelles et ce sont ces connaissances nouvelles qu'elle souhaite
acquérir à l'Institut Jean-Jacques Rousseau. Elle y rencontre Catherine Krafft
qui est directrice de la Maison des Etudiants et décident ensemble de fonder
l'Ecole de Beauvallon.
L'Institut
Jean-Jacques Rousseau est fondé en 1912 par Edouard Claparède (1873-1940)
médecin et psychologue, pour être une Ecole des Sciences de l'Education et
réunit les grands noms de l'époque : Adolphe Ferrière, Jean Piaget, Hélène
Antipoff et bien d'autres. L'enseignement y est imprégné des courants modernes
et novateurs de ce qui devient l'Ecole Nouvelle.
C'est une époque
convergente pour déterminer une éducation différente : "L'enfant n'est pas un
vase que l'on remplit mais un feu que l'on allume" beaucoup d'écoles nouvelles
se sont créées dans le monde entier :
Les
précurseurs en Angleterre dès la fin du 19ème sont les écoles anglaises d'Abbotsholme
en 1889, première école nouvelle anglaise fondée par Cecil Reddie (1858-1932), et de
Bedales en 1893, première école mixte fondée par John Badley (1865-1967), internats de
campagne s'adressant à une élite.
Aux USA, John Dewey
(1859-1952) fonde une école expérimentale dite école laboratoire de Chicago.
Suivi en 1898 par Hélène Parkhurst (1887-1973) qui créée une méthode de travail
connue sous le nom de plan Dalton s'adressant à des élèves de cours supérieurs
dans la ville de Dalton, Massachusetts, et qui précède l'ouverture en 1919 d'une
Ecole à New-York dont elle sera directrice. (N.B. elle a été l'assistante de
Maria Montessori).
Mais à leur suite,
très vite, dès le début du 20ème siècle, s'ouvrent des écoles dans le monde
entier :
En 1907 à Rome la
"Casa dei Bambini" de Maria Montessori (1870-1952); à Bruxelles l'"Ecole pour la
vie, par la vie" d'Ovide Décroly (1871-1932).
En 1910 en Allemagne,
l'Odenwaldschule créée par Paul Geheeb (1870-1961). Un de ses futurs directeurs, Ernest
Jablonsky (1913-1988), plus tard connu sous le nom de Jouhy, fut un pilier
de l'OSE : il rencontre l'Odenwaldschule en 1930 et expérimente l'Education Nouvelle au Château
de la Guette en 1939 (les 3 enfants juifs sauvés par Marguerite Soubeyran en
1942 en venaient via La Bourboule), par la suite, il travaille à Beauvallon en
1951 et crée le FIEF à la Bégude-de-Mazenc en 1961, association toujours
active en 2007, avant de se réimplanter en Allemagne pour tenter de
réhabiliter l'image que se faisaient de leur patrie les jeunes Allemands de ces
années d'après-guerre. Ecole mixte et progressiste, utopie scolaire réalisée,
sans surveillants, sans notes, où les élèves et les professeurs décident
ensemble, lors d'assemblées générales, des règles de conduite
communes.
En 1912, en Pologne
à Varsovie, la république des enfants "Dom Sierot" de Janus Korczac (1878-1942)
qui fut entièrement déportée à Treblinka en 1942.
En 1919 en Allemagne,
la "Libre école de Waldorf" de Rudoif Steiner (1861-1925) fondateur de
l'Antroposophie ; une continuité de son expérience avec les enfants des
familles ouvrières de l'usine de cigarettes Waldorf-Astoria initiée à la demande
de l'industriel en 1917 à Stuttgart.
En 1920 la "Colonie
Gorki" dirigée et créée par Anton Makarenko (1888-1939).
En 1927 l'école de
Summerhill en Angleterre bien que l'expérience de Alexander Neill (1883-1973)
ait débuté en fait en Allemagne, près de Dresden en 1921.
En 1935 l'école
Freinet de Célestin Freinet (1896-1966) ouvre ses portes à Vence. Bien
sûr, en France depuis 1899 existe l'Ecole des Roches inspirée des méthodes
actives et créée par Edmond Demolins (1852-1907) à Verneuil sur Avre, mais
l'Ecole de Beauvallon en 1929 sera la première école nouvelle et mixte en
France.
Tous se
connaissent, se rencontrent, suivent les recherches et les travaux des uns et
des autres : Ovide Decroly rencontré par Edouard Claparède, sera fondateur en
1921 de la Ligue Internationale de l'Education Nouvelle avec entre autres, John
Dewey, Jean Piaget (1896-1980), Maria Montessori, Béatrice Ensor (1885-1974) et
Adolphe Ferrière (1879-1960).
Par la suite la
1ère guerre mondiale ayant profondément marqué les esprits, il semblait que pour
assurer au monde un avenir de paix rien ne pouvait être plus efficace que de
développer chez les jeunes générations le respect de la personne humaine par une
éducation appropriée.
C'est ainsi qu'est
née l'Ecole de Beauvallon en 1929 au milieu de toutes les autres. Avec ce tronc
commun des nouvelles pédagogies appliquées et ces spécificités : climat d'amour,
de confiance, de sécurité, respect de l'autre, vision globale, autogestion,
responsabilisation, grand air, pleine nature, pas de barrière, internat et
mixité, mixité sociale également, univers familial, tutoiement des adultes,
importance des activités sportives, artistiques et intellectuelles et ses 2
piliers : l'Assemblée organe de fonctionnement et la Réunion du matin organe de
recueillement et de méditation.
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Marguerite Soubeyran est née à Dieulefit le 29
avril 1894.
Elle est le 5ème enfant et seule fille
auprès de 4 frères plus âgés qu'elle, et qui l'adorent. Elle est issue d'une
vieille famille protestante de Dieulefit, fille de Ovide Soubeyran et de Marie
Poulin. Son père travaille aux filatures Morin comme cadre, c'est un homme
profondément bon et généreux, humaniste, très attentif aux autres et très
attaché à sa fille unique. Dès son plus jeune âge, bouleversée par un livre qui
parlait d'enfants malheureux, abandonnés, Marguerite s'était dit : "il n'y a
rien à faire, moi je n'aurai pas d'enfant, j'adopterai des enfants et je
m'occuperai d'enfants".... Et c'est ce qu'elle a fait.
Elle commence par faire des études
d'infirmière à Paris, rue Amiot, c'est là qu'elle va se créer un réseau de
relations et d'amies (Jeanne Rivard, Madeleine Arcens, Alice Beaumet, Blanche
Reverchon, psychiatre femme de Pierre-Jean Jouve et Claire Bertrand, femme du
peintre Eisenschitz) qui la suivront toute sa vie. Malade et sans argent, de
retour à Dieulefit, elle prend conscience et déplore le manque d'établissement
de repos de qualité. Grâce au soutien inconditionnel de ses frères, et à sa
volonté inébranlable, elle va transformer une ferme familiale en maison de repos
: la Pension des Tilleuls, dans le quartier de Beauvallon, qui ouvre ses portes
en 1917. Elle est rejointe et aidée par son amie Jeanne Rivard. Celle-ci va
assurer la direction de la maison pendant que l'infatigable Marguerite repart à
Genève en 1927 entreprendre une formation à l'Institut Jean-Jacques Rousseau,
dans le but de s'occuper d'enfants en difficulté. Plus tard, Jeanne Rivard
épousera Mr Dourson, exilé Lorrain qui jouera un grand rôle à la Pension pendant
la guerre.
C'est là, à Genève, que Marguerite fait
la connaissance de Catherine Krafft, l'idée de la création d'une Ecole Nouvelle
à Dieulefit se concrétise, Catherine Krafft la suit en France, c'est le début
d'une très longue et très belle amitié. Elle adoptera 2 enfants, un garçon et
une fille : Fernand Soubeyran dit "Dadou" et Claudine Soubeyran.
A Beauvallon, elle utilise son grand
réseau de connaissances, elle inspire et initie les grands projets, elle
rassemble, elle provoque et recherche le changement , le renouveau, l'évolution,
reste en prise directe avec les grands courants pédagogiques. Elle incarne la
volonté, l'ouverture d'esprit, l'enthousiasme, le charisme, la force de vie, la
générosité, la confiance dans l'humain.
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Catherine Krafft est Suisse, née le 10 août 1899
à Begnins.
Elle est la 3ème d'une fratrie de 4
enfants, 3 filles et 1 garçon. Fille d'Anthony Krafft et Hélène Bonnard. Son
père est un pasteur très engagé auprès des Arméniens à la suite du génocide
perpétré par les Turcs à partir de 1915. Il fonde et dirige deux lieux
d'accueil : - le foyer arménien à Begnins où seront accueillis de 1922 à
1930, 142 orphelins arméniens, - le foyer de Genève pour 85 réfugiés. Il
est membre du Comité exécutif de la Ligue Internationale philarménienne.
Il plaide auprès de la Société des Nations en faveur des droits du peuple
arménien et stigmatise le Traité de Sèvres de 1920 qui accepte tacitement les
faits de guerre génocides envers les arméniens et la déportation des kurdes,
s'indigne de la réaction des ethno-nationalistes allemands qui admirent la
position énergique du jeune état turc et son slogan ultranationaliste "la
nouvelle Turquie pour les turcs". Il dénonce le traitement réservé aux réfugiés
apatrides lors de la conférence de Lausanne en 1922 et 1923 qui a déçu les
attentes du peuple arménien. C'est dans ce contexte que grandit Catherine
Krafft. Elle voue une grande admiration à son père et va s'engager à ses côtés
pour aider les arméniens. Elle pense se consacrer comme lui à l'Eglise, elle
suit pour cela la formation des ministères féminins. C'est à ce moment qu'on lui
propose le poste de Directrice de la Maison des Etudiants à Genève et c'est là
qu'elle va rencontrer Marguerite Soubeyran venue étudier à l'Institut Jean
Jacques Rousseau. Elles ne se quitteront plus et Catherine va partir
définitivement pour la France à Dieulefit, pour fonder en 1929 avec elle l'Ecole
de Beauvallon. Elle adoptera 2 enfants, une fille (ma mère), Jacqueline dite
"Kinou" Krafft et un garçon, Jacques dit "Jacou" Krafft.
Catherine Krafft sera le pilier de
Beauvallon en ce qui concerne l'intendance, la gestion des comptes et
l'organisation matérielle de la maison. Ma grand-mère était une femme modeste,
discrète, droite, courageuse et travailleuse, loyale et rigoureuse, pleine
d'énergie et de bon sens. Elle savait se faire aimer de tous sans effusion par
la grande qualité de son attention et de son écoute et sa profonde indulgence.
On pouvait être sûr de trouver auprès d'elle de bons conseils et du réconfort.
Très dévouée, elle n'avait aucun souci de sa personne et toujours le souci de
tous, donnant à chacun le sentiment d'être la personne la plus importante à ses
yeux. Parvenue à l'âge de la retraite et malgré la profonde tristesse d'avoir
perdu son amie Maguy (Marguerite Soubeyran) elle ne se plaindra jamais, et loin
de s'apitoyer sur elle-même, continuera à veiller sur les autres et jusqu'à ses
derniers instants, elle sera active en s'occupant des autres que ce soient ses
proches, ses anciens élèves ou les Boat-people vietnamiens, sa dernière cause,
clôturant la mission humanitaire de toute une vie.
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Les enfants juifs cachés pendant la
guerre
:
Texte préparé pour les élèves de
première du Lycée Alain Borne de Montélimar , lors de la rencontre organisée
à Beauvallon le 11 janvier 2007 par leur professeur d'histoire, Alexandre
Covelli .
Contrairement à la
Villa Emma et la Maison d'Isieu, Beauvallon n'est pas devenu un lieu et un nom
connu parce qu'il a été pendant la guerre un refuge pour les enfants juifs, ni
créé pour cela, ni organisé autour de l'accueil exclusif de ces enfants.
Beauvallon existe déjà bien avant le début de la guerre (en 1929) et déjà, dès
les prémisses de la montée du nazisme, outre une maison d'enfants d'avant-garde,
c'est un lieu d'accueil et de refuge pour Espagnols, réfugiés politiques
communistes, allemands anti-nazis, anti-fascistes, puis les premiers réfugiés du nord
et de l'est de la France, les premiers officiers blessés, rapatriés de Lyon
avant leur départ pour Londres, les intellectuels engagés, les juifs, les résistants, les
réfractaires au STO. Les enfants juifs qui ne sont pas accompagnés de leur
famille, y sont placés par l'OSE. Parallèlement à sa vie propre,
l'Ecole mène sa vie clandestine.
Les enfants juifs qui seront cachés là
pendant la période nazie seront parfois accompagnés d'un de leurs parents,
parfois les deux et bien mêlés aux autres enfants de l'Ecole (qui a continué ses
activités scolaires jusqu'à la fin du conflit).
Ces enfants vont donc vivre dans un
contexte que l'on imagine moins fermé, isolé, donc moins traumatisant et avec
sûrement moins de stress pour les adultes si l'on doit comparer avec ce qui se
passait à Nonentola ou à Isieu. D'autre part, la mixité entre juifs et non-juifs
au sein de l'Ecole devait jouer un rôle important pour l'équilibre mental de
chacun. La situation est donc bien différente et parait plus favorable ici à
Beauvallon.
Le point commun est l'engagement total,
résolu, indéfectible, des adultes ayant la charge et la responsabilité de ces
enfants et cela jusqu'au sacrifice de soi ainsi que leur volonté, leur
détermination à offrir coûte que coûte une vie normale à ces enfants, les
protéger physiquement bien sûr mais dans un contexte de jeux, de musique, de
théâtre, d'études, d'activités sportives, de développement et
d'épanouissement.
" Je me suis
souvent demandé quel pouvait bien être l'état d'âme de ces adultes le soir à la
veillée lorsque les enfants sont endormis. Le désespoir, la peur, la détresse,
la fatigue. Ici à Beauvallon les adultes se réunissaient, c'était le moment de
faire le point : s'informer en écoutant clandestinement la radio ou en
recueillant les récits de ceux qui arrivaient de l'extérieur , échanger ses
impressions, partager les émotions du moment, et une fois organisée la survie
des 100 personnes sur place, penser aux blessés, aux clandestins de passage, aux
maquisards de la montagne, aux personnes à évacuer d'urgence, mais grâce à
la présence de tous les intellectuels et artistes réfugiés à
Dieulefit et souvent réunis à Beauvallon la vie était exceptionnellement riche
et épanouissante et reste dans le souvenir de ceux qui l'ont vécue une
parenthèse de lumière au milieu du noir de la guerre (université libre créée par
Emmanuel Mounier en 43). "
Enfants juifs placés par la fondation
Rothschild en provenance du Château de la Guette en Seine et Marne (sources : le
compte-rendu de l'hommage public à Yvonne et Roger Hagnauer, le samedi 4juin
2005 à Sèvres ; les enfants cachés pendant la seconde guerre mondiale aux
sources d'une histoire clandestine par Céline Marrot-Fellague Ariouet) évacués
en mai 1940 devant l'avancée allemande, arrivés à Beauvallon en 1941 ou 42 ainsi
que d'autres enfants venant de La Bourboule.
Trois de ces enfants : Helmut David Meyer(16 ans), Werner Matzdorff et Henri
Schwartz sont raflés le 26 août 1942 et envoyés au camp de Vénissieux où
ils seront récupérés in extremis par Marguerite Soubeyran et Simone Monnier, aidées
par l'OSE, la CIMADE et l'Abbé Glasgerg.
Helmut Meyer va émigrer en Israël après
la guerre et s'occupera de la demande d'inscription des 3 directrices à l'ordre
des Justes auprès de Yad Vashem. Elles obtiennent la médaille en 1969 et un
arbre est planté au Jardin des Justes à Jérusalem.
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La Résistance à
Dieulefit
Résistance passive ou active de tout le village : beaucoup de réfugiés, aucune
dénonciation. Zone libre puis occupée par les Italiens
plus souples que les Allemands. Position géographique en fond de vallée. Pas
sur un axe d'offensive ou de repli. Il n'y aura jamais de garnison italienne
ou allemande dans le bourg, c'est un point capital : en zone
nord, une ville de cette importance avait sa Kommandantur.
Dès 1936 la population de Dieulefit est
motivée sur la guerre d'Espagne, mise à contribution par la mairie qui organise
l'accueil des réfugiés espagnols (une vingtaine) en 1939 puis crée un comité
d'Accueil le 25 mai 1940 pour les réfugiés de toute l'Europe:
Allemands (Gottesman dont le mari est
détenu au camps de Guers P.O (où il sera sauvé par le Dr Preault Noël 40),
juifs, anglo-saxons (c'est leur zone d'assignation à résidence), anti-facistes
allemands, républicains espagnols, Alsaciens, communistes, civils fuyant le Nord
et l'Est. Plus tard également des réfugiés "légaux" de la zone sud envoyés par
le préfet du Var craignant un débarquement des allemands en Méditerranée (ce qui
sera bien utile à Jeanne Barnier pour brouiller les pistes en falsifiant les
papiers).
Rôle des Catholiques : l'Abbé Magnet à
Poët-Laval organise le maquis des réfractaires au STO avec Beauvallon et
participe à un groupe de réception de parachutages, il distribue également de
faux certificats de baptême (les catholiques sont conscients de l'opposition
d'Hitler à la religion, conscients de l'anti-christianisme plus que de
l'antisémitisme). La revue Esprit fondée en 1932 par Emmanuel Mounier (qui
enseigne le français les maths et la philosophie à la Roseraie) est
caractérisée par le refus de toute compromission de l'Eglise et le refus de se
soumettre au chantage de l'oppression.
Rôle des protestants : ils sont unis sur
le même objectif : aider les réfugiés étrangers. Pasteurs Eberhard, Marchand et
surtout Debû-Bridel à Poët-Laval (fait partie de la LICRA en tant que membre
actif, il est un des piliers de la Résistance rallié à De Gaulle dès
l'armistice).
Rôle de la gendarmerie : complicité,
ferme les yeux, protège Jeanne Barnier.
Rôle de la
Mairie : favorable tout de suite à l'accueil des réfugiés. Le Maire Justin
Jouve, très
aimé et respecté, probablement fédérateur de l'opinion dans ce petit village où tout
le monde se connaît ; il est destitué pour n'avoir pas voulu
faire allégeance à Pétain, il démissionne et il rallie la Résistance.Remplacé par le Général Pizot nommé par Vichy
dont il a l'entière confiance. Il va fermer les yeux sur les activités
clandestines de sa Secrétaire de Mairie, ainsi que le 1er
adjoint.
La secrétaire de Mairie, Jeanne Barnier
(médaillée des Justes) va jouer un rôle des plus importants par la fabrication
de faux-papiers, pour les juifs mais aussi pour les résistants de l'Armée
secrète, les FTP et l'abbé Glasberg.
Rôle de Beauvallon
: les directrices sont très politisées et ont
beaucoup de relations dans tous les millieux. Informées dès 1938 lors d'un voyage
en Angleterre de la réalité des persécutions nazies, orientées sur l'accueil,
l'ouverture, le don de soi, la générosité, on peut dire qu'elles sont "prêtes" à
l'action et à la résistance. Tout de suite arrivent les premiers officiers
blessés rapatriés de Lyon avant leur départ pour Londres, les blessés du
Vercors, les enfants et adolescents juifs, les adultes réfugiés politiques. Elles
sont en contact avec le Maquis, participent à l'organisation et soutien du
maquis des réfractaires au STO sur Montmirail (parachutages et liaison), et
l'organisation de passages en Suisse (Mr Bernard Bernson).
Rôle de La Pension : Mme Rivard , Mr et
Mme Dourson et de La Roseraie : Pol Arcens et sa femme Mad (tous les deux
médaillés des Justes) : accueil et protection de réfugiés et de
juifs.
En tout 1500
réfugiés à Dieulefit pour 3500 habitants grâce
à une complicité sans défaillance de tout le
village.
A Dieulefit
l'accueil humanitaire et inconditionnel du début s'est transformé en une
résistance qui participe plus d'un réflexe de solidarité que d'une attitude
politique dictée par une aversion à une idéologie. Cet accueil humanitaire et le
consensus de solidarité sont à l'origine de la résistance organisée qui va
suivre. La Résistance participe plus à un réflexe qu'à une réelle sensibilité
acquise dans les années précédent la guerre. Elle n'est pas anticipée, préparée,
doctrinaire. Elle est libre, spontanée.(S. Suchon); il règne dans ce petit
village une atmosphère de fraternité assez exceptionnelle (S.
Suchon).
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Artistes et intellectuels à Dieulefit pendant la
guerre
Ils se retrouvèrent ou se
croisèrent:
Les poètes : Alain
Borne Aragon Pierre Emmanuel Pierre-Jean Jouve Pierre Leyris Loys
Masson Pierre Seghers Elsa Triolet
Les journalistes : Marcelle
Auclair André Rousseaux Andrée Viollis
Les philosophes : Emmanuel
Mounier
Les musiciens : Fred Barlow Yvonne
Lefébure
Les peintres : Willy
Eisenschitz Robert Lapoujade Wols
Les sculpteurs : Pierre
Guastalla Etienne Martin
Les écrivains : Emmanuel Bove
(Bobovnikoff) Benigno Caceres Jean Giono Clara Malraux Daniel
Rabinovitch Pierre-Henri Rocher Georges Sadoul Geneviève
Serreau
Le metteur en scène Jean-Marie
Serreau,
L'avocat Nordmann,
Le graphologue Bernard Bernson,
Le cinéaste Jean Vidal,
Le diplomate suisse Lachenal,
Le professeur d'histoire de Heidelberg
Max Springer,
Les communistes et anti-fascistes
Herman Nundig et Ella Winzer-Schwarz,
Le résistant Jean Prevost,
L'historien Pierre Vidal-Naquet.
Texte par Anne
Lachens
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